J'ai encore le souvenir où le soir nous dinions à 19h00 car mon père travaillant à l'UTEPAL(1) en 3/8, devait commencer son travail à 20h00 pour finir à 4h00, après manger, ma mère, mon frère et moi le regardions démarrer sa mobylette (pas de permis, pas de voiture) dans l'impasse des Halles où nous habitions.
Ces souvenirs sont un peu flous dans ma tête car ils datent d'entre 1958 et 1960, étant né en 1955 et mon père ayant quitté l'usine juste avant qu'elle ne ferme en 1961. J’avais alors 3, 4 et 5 ans.
C'était les temps héroïques : 60% des ouvriers en ce temps-là allaient travailler en vélo ou mobylette, en plein hiver ou sous la pluie ce n'était pas une partie de plaisir.
Mon père me racontait toujours une anecdote d'un ouvrier (pas très futé), qui habitait Tressan de l'autre côté du fleuve Hérault et qui donc pour venir travailler à l'usine (en mobylette), passait par le pont de Canet. Un jour de gros orage il est venu à l'usine en personne (à l'époque les téléphones étaient assez rares dans les foyers ouvriers) pour prévenir qu'il ne viendrait pas travailler ce jour-là, car sa mère ne voulait pas qu'il parte en mobylette avec un temps pareil et s'en est reparti aussitôt chez lui. Comme je vous l'ai dit précédemment, il n'était pas très futé, la direction ne lui en a pas tenu rigueur.
Une autre anecdote moins amusante celle-là, c'est quand un ouvrier est tombé assis dans la cuve d'acide qui servait à ramollir le genêt avant de le travailler. Dans son malheur, il a eu de la chance car qu'il n'était pas seul, ses collègues (dont mon père) l'ont rapidement sorti et emmené sous la douche, il s'en est sorti heureusement qu'avec quelques brulures superficielles et deux semaines d'arrêt de travail mais un mois après il avait encore du mal à s'assoir, il faut dire qu'en ce temps-là, la sécurité au travail laissait un peu à désirer.
(1) Le sigle de l'UTEPAL signifiait Union Textile et Papetière du Languedoc
Jean-Luc BIROUSTE
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